"Heureux les cœurs purs, ils verront Dieu"  (Matthieu 5,)

Le discours sur la montagne marque le début de la prédication de Jésus. Sur une 

colline des environs de Capharnaüm, face au lac de Tibériade, Jésus, assis comme 
le faisaient les maîtres, se met à expliquer aux foules qui est l’homme des 
béatitudes. Déjà à plusieurs reprises, l’Ancien Testament déclarait 
« bienheureux » celui qui accomplit, d’une manière ou d’une autre, la Parole du 
Seigneur.
Les béatitudes de Jésus évoquent donc pour les disciples quelque chose qu’ils 
connaissaient déjà. Cependant, c’est la première fois qu’ils entendent dire que 
les pauvres de cœur, non seulement sont dignes de gravir la montagne du 
Seigneur, comme le chantait le psaume, mais peuvent même voir Dieu. Quelle est 
donc cette pureté qui mérite une telle récompense ? Jésus va l’expliquer 
plusieurs fois au cours de sa prédication. Cherchons à le suivre, pour puiser à 
la source de l’authentique pureté.

« Heureux les cœurs purs, ils verront Dieu. »

Selon Jésus, un moyen de purification l’emporte sur tous les autres : « Déjà 
vous êtes émondés par la Parole que je vous ai dite ». Ce ne sont pas les 
exercices rituels qui purifient l’âme, mais la Parole. La Parole de Jésus n’est 
pas comme les autres. Le Christ y est présent, comme il l’est — quoique d’une 
autre manière — dans l’Eucharistie. Par sa Parole, le Christ pénètre en nous et, 
si nous la laissons agir, elle nous libère du péché et purifie notre cœur.

La pureté est donc l’effet de la Parole vécue. Vivre la parole, toutes les 
Paroles de Jésus, nous libère de nos « attachements » qui prennent le dessus si 
notre cœur n’est pas en Dieu et centré sur ses enseignements. Ces attachements 
peuvent concerner des choses, des créatures, ou bien nous-mêmes. Alors que si 
notre cœur est centré sur Dieu seul, tout le reste disparaît.


Pour parvenir à ce détachement, il peut être utile de dire souvent à Dieu, à 
Jésus, au cours de la journée, cette invocation du psaume : « Tu es, Seigneur, 
mon unique bien ! ».

Répétons-la souvent, surtout lorsque nos « attachements » nous attirent vers 
certaines images, sentiments ou passions pouvant troublé en nous la conscience 
du bien et nous priver de notre liberté. 

Sommes-nous tentés de regarder certaines publicités, certains programmes 
télévisés ? À ce moment-là, disons-lui : « Tu es, Seigneur, mon unique bien ». 
Ce sera le premier pas pour sortir de nous-mêmes, pour déclarer à Dieu notre 
amour. Nous aurons ainsi grandi dans la pureté.

Une personne, ou une activité, s’interposent-t-elles entre Dieu et nous, faisant 
obstacle et même gâtant notre rapport avec Lui ? C’est le moment de lui redire : 
« Tu es, Seigneur, mon unique bien ». Cela nous aidera à purifier nos intentions 
et à retrouver la liberté intérieure.

« Heureux les cœurs purs, ils verront Dieu. »


Vivre la Parole nous rend libres et purs parce qu’elle est amour. Le feu divin 
de l'amour purifie nos intentions et notre être profond, car le « cœur » est, 
d’après la Bible, le siège de l’intelligence et de la volonté.

Cependant, une certaine forme d’amour, objet d’un commandement de Jésus, nous 
aide spécialement à vivre cette béatitude. C’est l’amour réciproque, l’amour de 
celui qui est dans la disposition de donner sa vie pour les autres, à l’exemple 
de Jésus. Ce style d’amour suscite un courant, un échange, une atmosphère dont 
la note dominante est justement la transparence, la pureté. En effet, dans cet 
amour-là, Dieu est présent et Lui seul peut créer en nous un cœur pur. Quand 
règne l’amour réciproque la Parole peut réaliser ses effets de purification et 
de sanctification.

Une personne isolée est incapable de résister de manière durable aux 
sollicitations du monde. Dans l’amour réciproque elle trouve un excellent 
terrain où chacun peut rester pur et vivre sa vie chrétienne de façon 
authentique.

« Heureux les cœurs purs, Ils verront Dieu. »

L’effet de cette pureté, toujours à reconquérir, est de nous permettre de 
« voir » Dieu, ce qui signifie comprendre son action dans notre vie et dans 
l’histoire, entendre sa voix dans notre cœur, savoir saisir sa présence là où 
elle se trouve : dans les pauvres, dans l’Eucharistie, dans sa Parole, dans la 
communion fraternelle, dans l’Église.

C’est un avant-goût de la présence de Dieu qui nous est donné dès ici-bas, dans 
cette vie où nous « cheminons dans la foi, sans voir », en attendant de pouvoir 
le voir « face à face », éternellement.

 

Chiara LUBICH

"Donnez et on vous donnera. C’est une bonne mesure, tassée, secouée, débordante qu’on vous versera dans le pan de votre vêtement."  (Lc 6, 38)

 

Ne t’est-il jamais arrivé de recevoir un cadeau d’un ami et de ressentir la nécessité de lui en offrir un à ton tour ? Non pas tant pour t’acquitter d’une dette, mais pour lui exprimer ta reconnaissance et ton amour ? Oui, certainement.

Si cela t’arrive à toi, tu peux imaginer ce qu’il en est pour Dieu, pour Dieu qui est Amour.


Il donne toujours en retour à chaque cadeau offert à notre prochain en son nom. Cette expérience les chrétiens la vivent souvent. Et c’est chaque fois une surprise. On ne s’habitue jamais à l’imagination de Dieu. Je pourrais te donner bien des exemples, même en écrire un livre. Tu verrais combien cette image est vraie : « une bonne mesure, tassée, secouée, débordante, qu’on versera dans le pan de ton vêtement ». Une image qui exprime la générosité avec laquelle Dieu sait payer de retour, sa magnanimité.


« La nuit était déjà tombée sur Rome. Et dans leur petit appartement en sous-
sol, le groupe des quelques jeunes filles qui s’étaient engagées à vivre l’Évangile, se souhaitait bonne nuit. On entendit alors la sonnette. Qui pouvait bien venir à une heure pareille ? Un homme était à la porte, complètement paniqué, désespéré : n’ayant pu payer son loyer, il allait être expulsé le lendemain de chez lui avec sa famille. 
Les jeunes filles se regardèrent et ouvrirent le tiroir où, dans des enveloppes, elles avaient rassemblé ce qui restait de leurs salaires, ainsi qu’une réserve pour les quittances du gaz, du téléphone et de l’électricité. Elles donnèrent tout à cet homme sans raisonner davantage. Cette nuit-là, elles dormirent heureuses, un Autre penserait bien à elles. 

Dès l’aube un coup de téléphone. “J’arrive tout de suite en taxi” dit la voix, celle de l’homme qu’elles avaient reçu quelques heures auparavant. Étonnées par le choix de ce moyen de transport, les jeunes filles attendent. Le visage de leur hôte indique que quelque chose a changé : “Hier soir, à mon retour chez moi, j’ai trouvé dans le courrier une lettre m’informant que je venais de recevoir un héritage auquel je ne m’attendais absolument pas. Mon cœur me pousse à le partager avec vous”. La somme qu’il déposa entre leurs mains correspondait au double de ce qu’elles avaient généreusement donné. »


« Donnez et on vous donnera. C’est une bonne mesure, tassée, secouée, débordante 
qu’on vous versera dans le pan de votre vêtement. »


En as-tu fait toi aussi l’expérience ? Sinon, rappelle-toi que le vrai don ne peut-être que désintéressé, sans espoir de retour, et à quiconque te le demande. 

Essaie. Ne le fais pas pour voir le résultat, mais pour aimer Dieu. Tu me diras : « Mais je n’ai rien à donner ». Ce n’est pas vrai. Si nous le voulons, nous avons des trésors inépuisables : notre temps libre, notre cœur, notre sourire, nos conseils, notre culture, notre paix, notre parole pour convaincre celui qui a de quoi donner à celui qui n’a pas…

Tu me diras encore : « Mais je ne sais pas à qui donner ». 

Regarde autour de toi : tu te souviens de ce malade à l’hôpital, de cette veuve toujours seule, de cet étudiant recalé et tellement découragé, de ce jeune chômeur toujours triste, de ton petit frère qui a besoin d’aide, de cet ami en prison, de cet apprenti hésitant ? C’est en eux que le Christ t’attend.

Assume l’attitude imprégnée d’Évangile du chrétien, attitude qui exclue fermeture et préoccupation. Renonce à placer ta sécurité dans les biens de la terre et appuie-toi sur Dieu. C’est là que l’on verra ta foi en lui, foi qui sera d’ailleurs rapidement confirmée par la récompense que tu recevras en retour.

Il est normal que Dieu n’agisse pas ainsi pour t’enrichir ou nous enrichir. Il le fait pour que d’autres, beaucoup d’autres, constatant les petits miracles obtenus par les dons, se mettent à suivre cet exemple. 

Il le fait pour que, possédant plus, nous puissions donner davantage ; pour que, véritables administrateurs des biens de Dieu, nous fassions tout circuler dans la communauté qui nous entoure, afin que l’on puisse dire, comme pour la première communauté de Jérusalem : il n’y avait aucun pauvre parmi eux.(Cf. Act 4,34)

Ne sens-tu pas qu’avec cela tu contribues à donner une âme sûre, un fondement 
solide à la révolution sociale que le monde attend ?

« Donnez et l’on vous donnera ». Il est certain que Jésus pensait tout d’abord à la récompense que nous aurons au Paradis, mais ce qui nous arrive sur cette terre en est déjà le prélude et la garantie.


Chiara Lubich:

* Parole de Vie publiée en octobre 2008

 

« Frères, ne gémissez pas les uns contre les autres. » (Jacques 5, 9)

Pour mieux comprendre cette Parole de Vie, rappelons-en les circonstances. Elle concerne les divisions apparues dans les communautés chrétiennes auxquelles s’adresse la lettre de l'apôtre Jacques : scandales, discriminations sociales, usage égoïste des richesses, exploitation des ouvriers, foi vécue en paroles plus qu'en actes, etc. D’où des ressentiments et des mécontentements des uns envers les autres, source de malaise dans toute la communauté.
 

« Frères, ne gémissez pas les uns contre les autres. »

Déjà l'époque des apôtres connaissait ce que l'on constate encore aujourd’hui 
dans nos communautés. Souvent, les plus grandes difficultés à vivre notre foi ne viennent pas de l'extérieur, du monde, mais bien de l'intérieur : de certaines 
situations ou attitudes de nos frères, qui ne sont pas dans la ligne de l'idéal 
chrétien. Cela fait naître un sentiment de malaise, de découragement et de 
désarroi.


« Frères, ne gémissez pas les uns contre les autres. »

Si toutes ces contradictions et incohérences plus ou moins graves proviennent 
d’une foi pas toujours éclairée et d’un amour envers Dieu et le prochain encore 
très imparfait, la première réaction du chrétien ne devra pas être celle de 
l'impatience, ni de l'intransigeance, mais celle que Jésus enseigne. Il demande 
l'attente patiente, la compréhension et la miséricorde, qui permettent de 
développer ce germe de bien qui a été semé en nous, comme l'explique la parabole de l'ivraie. (Mt 13,24-30 et 36-43).


« Frères, ne gémissez pas les uns contre les autres. »

Comment vivre cette Parole de Vie ? 
Elle nous met face à un aspect difficile de la vie chrétienne. Nous aussi, nous 
faisons partie de différentes communautés (famille, paroisse, association, 
milieu de travail, communauté civile), où malheureusement, tout ne va pas 
toujours bien : tempéraments, manières de voir et d’agir de certaines 
personnes ; incohérences qui nous affligent et suscitent en nous des réactions 
de rejet.
Voilà donc de nombreuses occasions pour bien vivre la Parole de Vie de ce mois. 
À la place des médisances ou des condamnations – que nous serions tentés de 
prononcer – pratiquons la tolérance et la compréhension et également, dans les 
limites du possible, la correction fraternelle, en nous éclairant réciproquement 
sur les points à améliorer. Et surtout, nous donnerons ainsi un témoignage 
chrétien, en répondant aux éventuels manques d'amour ou de persévérance, par 
plus d’amour et d'engagement de notre part.

Chiara LUBICH